• PRESAGE •

Nous faisons route en cage, comme de vulgaires animaux de cirque voués à divertir le peuple de Rome. Peu importe, car le soleil brille enfin et réchauffe ma peau. Peu importe car sur un autre chemin, nos deux fils prennent la fuite avec leur nourrice, Dunnonia, vers le port de Massilia. De loyaux amis de notre famille les attendent en Egypte. Chaque matin, Eponine revenant du marché faisait tomber quelques fruits de son panier devant le seuil de la porte de Dunnonia pour lui indiquer que tout allait bien. Elle ne trouvera rien devant sa porte ce matin, elle saura quoi faire.

Le voici enfin, face à nous, Vespasien. La sentence tombe... sur le champ de mars, demain, je serai crucifié : le sort que l'on réserve aux prisonniers politiques. Eponine se mit à hurler, implorant sa clémence. Mise à son tour à genoux, elle finit par demander à César de partager mon sort. "Une place vient de se libérer dans nos geôles, qu'on exécute aussi cette folle" prononce Vespasien. Alors que l'on nous emportait, elle se débattit et se glissa hors des bras des gardes, avança de nouveau vers l'Empereur, avec un regard terrifiant. Si bien que le visage de Vespasien se figa, tandis qu'Eponine prononçait une tout autre sentence...

"Je te maudis ! dans les ténèbres et sous la terre, j’ai vécu plus heureuse que toi sur ton trône. De l’arbre sous lequel il t'a juré la guerre, par vaux et par mont cent corbeaux s’envoleront. Répandre le nom de Sabinus sur la terre, à l’ombre de leurs ailes, mes fils grandiront. Et pour chaque larme de sang Lingon versé Une graine de rébellion sera semée. Nous cultiverons les germes de la vengeance, goutte après goutte, distilleront l'indépendance. Jamais terres lingonnes ne ploieront devant toi, César, Eponine te condamne au trépas."